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20 septembre 2001... Thingvellir, plongée sur la lune...
Ce matin je pars en direction de Reykjavik, pour chercher David, un des instructeurs de Tomas. Nous prenons la direction de Thingvellir. C'est le lac le plus grand d'Islande, et, certainement le plus clair. Une petite heure de route et nous arrivons dans un paysage de lichen et de buissons, entrecoupé de fractures. C'est dans l'une d'elles que nous allons plonger. Thingvellir est une région historique. Dans cet endroit, un peu étrange se réunissaient, il y a plus de mille ans, les divers chefs de tribus vikings. Nous nous préparons à quelques mètres d'une faille. Vue de l'extérieur, elle ressemble à une flaque de 15m de long et peut-être 5m de large. Mais attention... la première gouille est percée de passages et de grottes. Mise à l'eau... je dois avouer n'avoir jamais plongé dans quelque chose de semblable. Visibilité à l'infini, aucune particule dans l'eau. La première cuvette donne accès, par une grotte, à une seconde puis à une troisième faille, pour finir dans un lagon indescriptible. Nous passons la première grotte à 12m de fond environ. Je repère en passant qu'une faille est ouverte dans cette grotte et qu'elle à l'air profonde. J'essaie d'éclairer pour tenter de voir le fond...impossible. Renseignements pris par la suite, la profondeur avoisine les 50m, mais il reste énormément à explorer et les profondeurs maximums ne sont encore pas définies. Dès l'entrée dans la deuxième chambre nous longeons un cayon d'environ 20m de profondeur.

Notre excursion du jour est un survol de la faille afin de repérer les meilleurs endroit à photographier. Et il y en a... Je pense qu'il va me falloir plusieurs plongés pour travailler sur les différents paysages qui défilent devant mon masque. La fin de la dernière faille (cf.photo de Tomas) débouche sur un talus d'une consistance lunaire. Chaque coup de palme trop proche du sol lui donne un mouvement de va et vient semblable à un morceau de gélatine que l'on agiterait sur une assiette. Arrivés au sommet de la pente, nous sortons jusqu'à mi-hauteur de l'eau, histoire de réchauffer un peu les mains. L'eau est vraiment très froide. Elle arrive dans le lac non par voie extérieure, mais diffuse au travers de micro-fissures dans le sol, si bien que les algues se meuvent comme si elles étaient soufflées depuis dessous. Nous repartons en direction du lagon. Paysage lunaire où cratères et lave se sont figés dans le froid d'une eau de cristal. Le lagon est profond de quelques mètres seulement mais la lumière qui le traverse lui donne un volume si étrange qu'il semble échapper à toute mesure. Arrivés à l'extrémité de cette faille nous sortons de l'eau, frigorifiés.

Photo:Tomas J.Knutsson
Petite note: le mot silfra (nom de cette faille) se traduit par argent. Effectivement, l'eau étant d'une telle pureté lorsque l'on expire l'air du détendeur et que l'amas de bulles se dirige vers la surface on croirait voir une volumineuse poignée de monnaie lancée dans la lumière du soleil; d'une surprenante beauté...
Une petite maladresse de ma part au moment de ma mise à l'eau a laissé entrer quelques litres d'eau très pure dans ma combi. Je barbotte dans un fond de combi détrempée. Ne voulant pas gâcher la plongée, je n'ai rien dit à David. Mais en me changeant, il constate que l'on devra se contenter d'une plongée pour aujourd'hui.

Pour la petite histoire qui fera rire certains: en remettant la clef de la voiture dans mon sous-vêtement de plongée, une dizaine de centimètres de fermeture-éclair étanche est restée ouvert, juste à la hauteur de la cuisse. Heureusement que l'accès au site se fait par étage, de cette façon les dégâts ont été limités. Imaginez: vous sautez avec tout votre bardat là où vous n'avez pas votre fond. Le temps de refermer la "petite" ouverture, vous êtes innondé de la tête au pied... C'est arrivé à d'autres et cela m'a toujours fait beauccoup rire... alors ne vous gênez pas.

De retour à Keflavik je n'ai qu'une chose en tête, repos absolu. Mais Tomas n'est pas de cet avis et il me propose d'aller voir dauphins et baleines encore une fois. Ils sont tous là ce soir, il les sent. On saute dans le zodiac, et c'est sans regret que l'on file à toute allure sur une mer plate. Dix minutes après, premier aileron à la surface. On manoeuvre l'embarcation de manière à susciter la curiosité, et l'on attend. Et celle-ci était curieuse... une baleine d'environ 5 mètres tourne autour de nous pendant près de 10 minutes. Instant magique, Tomas saute de joie dans tous les sens.

Thingvellir, un peu d'histoire

Ce parc national résume à lui tout seul , l'histoire tant géologique qu'humaine de l'Islande. Site historique où les premiers colons vikings, en quête d'une liberté qu'ils avaient perdue en Norvège sous le règne d'un roi unificateur tyrannique, établirent en 930 le premier parlement au monde, l'Althing. Grande leçon de démocratie donnée par ces vikings souvent violents et ivrognes, alors que sur le continent régnaient les intrigues et assassinats de l'époque féodale. Ces assemblées furent supprimées à la fin du XVIIIe siècle, lors des dominations norvégienne et danoise. Mais c'est à Thingvellir que fut proclamée en1944, l'indépendance du pays.

Le site de Thingvellir est situé sur la jonction des plaques eurasienne et americaine, dans une large faille d'effondrement parallèle au rift volcanique. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, les paysages sont assez reposants. Il s'agit d'une grande plaine verdoyante dominée par un vaste amphithéâtre naturel, le mur de lave limitant le fossé d'effondrement .Le lac Thingvallavatn et ses 83 kilomètres carrés (pour 114 mètres de profondeur maximale) semble déposé sur ce décor délicat de lichen et de lave.

Au delà de la rivière Öxara, un petit pont franchissant la Flosa, cette fissure emplie d'eau froide à quelques degrés Elle est issue d'un trajet sous-terrain l'amenant du Langjökull, glacier situé plus au sud. Sous ce petit pont des milliers de pièces de monnaie reflètent la lumière de la surface. Autant de voeux réalisés, espérons le...

Nous reprenons notre route et suivons quelques jeunes dauphins. Impossible de leur donner envie de jouer, ils sont encore petits et la peur du moteur les fait fuir. Nous croisons un chalutier près duquel Tomas s'arrête pour un brin de causette dont je ne comprends décidément pas un seul mot. Peu après deux des membres de son club nous rejoignent en jetski. Petite séance photo puis ils s'en vont à tout allure sous les sourires de Tomas qui me lance "tu sais, Manu, dans chaque homme il y a un petit enfant qui sommeille, et un jouet..." il regarde les deux minuscules silhouettes de ses amis à l'horizon, puis son zodiac et ajoute: "çà, c'est mon jouet...". Retour au port, je suis transi; ma combinaison de plongée étant trempée de ce matin, je suis parti en mer en jeans avec une veste et un coupe vent.

A chaque retour de mer, Tomas prend un soin énorme à nettoyer son "jouet", afin d'enlever le sel et autres algues coincées parfois dans l'hélice. Même tarif pour les jetskis qui viennent d'arriver.

Inutile de dire que je ne rêve que de dormir... mais cela ne suffit pas. "Allons à la piscine" me propose-t-il. L'eau chaude du jakuzzi à 32°C eu raison de moi... je rentre en tenant juste sur mes jambes. Bonne nuit!

21 septembre 2001... "Pourquoi-Pas?", deuxième tentative...
Réveil douloureux ce matin. Les genoux me font mal à cause de la position que j'ai prise hier dans le zodiac pour faire les photos. Il faut dire que les courses poursuites sont souvent très rapides dans un premier temps et l'embarcation fait des sauts avant de se calmer une fois l'attention des dauphins attirée. Des courbatures comme après un marathon... Je suis à peine levé que Tomas arrive, avec le déjeuner. Je commence à prendre goût au service parfait... Il s'en va ce matin vers le Danmark et me laisse les clefs du club, dans lequel je peux loger jusqu'à mon départ la semaine prochaine. Je ne sais comment le remercier de toutes ces magnifiques découvertes qu'il m'a offertes. Dès mon retour en Suisse, je lui enverrai de quoi se faire une bonne crise de foie avec du Toblerone, c'est son chocolat préféré.

Merci Tomas, du fond du coeur. Grâce à toi, j'ai découvert une Islande nouvelle, par les yeux d'un passionné de la mer et de la vie. Impossible de marquer plus profondément l'âme que l'amitié et la générosité dont tu as fais preuve avec ce petit Suisse perdu sur "la lune".

12h30, je reprends cette route qui m'est si familière maintenant, direction Borgarnes. Je viens de téléphoner à Svanur, il pense qu'une tentative serai envisageable sur le "Pourquoi-Pas?", cet après-midi. Malheureusement, le temps change rapidement en Islande. Environ 1h30 de trajet, et nous devons renoncer. On discute un peu à son office et il me demande quand je quitte l'Islande. Il enclenche son ordinateur pour consulter la météo. Demain: pluie et vent. Les jours suivants sont imprévisibles mais avec la supposition que le vent ne soit pas trop fort en début de semaine, une dernière tentative serait possible mercredi... Il faut en effet attendre au moins trois jours pour que l'eau redevienne "claire" dans cette partie du fjörd.Il ne reste plus qu'à se tenir les pouces... Km 10000...

22 septembre 2001... entre corvées et repos...
Malheureusement, la vie d'aventurier ne se déroule pas sans l'inévitable corvée... aujourd'hui, c'est mon jour de lessive. Comme le temps est venteux à l'infini je profite de terminer la rédaction de certains articles du site et de préparer le matériel pour les prises de vue à Thingvellir. Un peu de repos sera également bienvenu.
23 septembre 2001... Thingvellir, prises de vue sous-marine...
départ de la plongée, on accède à la suite de la fissure par un réseau sous-marin de grottes
C'est une nuit tout de petits morceaux de sommeil appondus que je viens de passer. Le club de plongée où je passe les nuits est situé non loin d'un café, semble-t-il, assez fréquenté le samedi soir. La musique, d'un volume indescent, m'a réveillé à moultes reprises. Finalement, vers 2 heures du matin tout s'est gentiment calmé. Vers 8 h30, le matériel est préparé. Le temps semble assez clair pour tenter une plongée-photo à Thingvellir.

Je prépare le caisson étanche avec l'appareil moyen-format et un grand-angle (correspondant environ à 21mm). Je charge un film 220, (400ASA HP5, de Ilford) dont l'autonomie est de 21 photos... c'est, malheureusement le maximum de prises de vue dont on dispose sur ce type de matériel professionnel. Cependant, j'enfouis dans une poche intérieure de mon sous-vêtement de plongée un film de rechange, la tige d'ouverture du boîtier et, petite chose à ne pas oublier, un linge bien sec. Je referme ma combinaison étanche, en espérant que la mauvaise surprise de la dernière descente ne se reproduise pas. Sous les yeux emmerveillés d'un petit garçon, que sa maman tient fermement par la main afin d'éviter une chute sur ce sol instable, je me glisse doucement dans l'eau. Mon masque de plongée semble le fasciner. Un petit signe de la main et je disparais dans le premier bassin...

arrivée dans ce petit lac, l'accès au lagon se fait ensuite par le côté gauche, par une succession de bassins
C'est toujours cette même impression de flotter dans l'air. L'eau est d'une clarté absolue. J'accède par une grotte d'une dizaine de mètres de profond au second bassin. Début des prises de vue, le soleil vient timidement frôler la surface, c'est un instant vraiment sublime. Devant moi, le premier cayon. Le sol est à une vingtaine de mètres de profond, mais de là j'aperçois l'entrée de plusieurs grottes dont les profondeurs sont très nettement supérieures. Je traverse, entre deux eaux, le second cayon et j'arrive dans un petit lac, peu profond (photo ci-dessus). Dernière prise vue, déjà. Je m'approche de l'îlot qui me fait face, enlève ma bouteille et me hisse hors de l'eau. Changement de film un peu difficile, mais j'évite, avec cette petite astuce de devoir retourner à la voiture au travers de ce dédale d'îles et de fissures. Le changement effectué, je referme la combi et me remets à l'eau, continuant mon trajet, j'atteins le dernier talus avant le lagon...
Impossible de décrire un endroit tel que celui-ci, qui ne ressemble à rien de terrestre. Je me laisse prendre au jeu et, malheureusement, j'arrive au lagon en ayant terminé le film. Je n'avais pris qu'une bobine de rechange. Vu le problème lié à l'humidité et au froid, un second changement de ce type est à éviter. Lors du chargement précédent déjà, il m'a fallu beaucoup de patience et de doigter pour éliminer la totalité de la buée qui se dépose instantanément sur les parties en verre dès l'ouverture du caisson. Mais, il me reste suffisament de jours pour effectuer encore quelques découvertes dans cet endroit hors du temps et de l'espace...
J'ai pensé, voici quelques semaines, que l'Islande était passée d'un été frileux vers un hiver pluvieux sans laisser le temps à l'automne de manifester ses couleurs flamboyantes. Je m'étais trompé... Une fois le matériel remis en place, je m'arrêtai quelques instants, un peu plus en amont, près d'un petit pont, duquel s'envolent chaque jours des centaines de pièces de monnaie, portées par des voeux. Au milieu de cette nature aux aparats de fêtes somptueuses, chaque centimètre carré de sol revêt une multitude de couleurs aux saveurs si profondes qu'on aimerait y goûter. La lumière avait changé depuis longtemps, mais le caractère de chaque plante, de chaque arbustre conservait en lui la chimie d'une couleur qui se voulait différente pour chacun. Complicité et harmonie naissaient de cette diversité, d'une main d'artiste... Automne.
suite...
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